Année 2002 - Semaines 11 à 20

 

Bruno, en attendant Jean-Claude…

Cher Bruno Sido,
Vous avez-eu la bonne idée de lancer un vaste débat sur les assises du développement en Haute-Marne. Vous avez soulevé de bien pertinentes questions. On peut même parler de survie. Las, nul, parmi vos bons amis politiques, n'a daigné jusqu'à ce jour, évoquer ce thème.
On les retrouve, vos bons amis, prompts à répondre au cri des urnes, le soir, au fond de la mairie. Tels qu'en eux-mêmes, confondants d'ambition personnelle, presque vexants à vouloir nous faire prendre leur vessie gonflée d'arrogance pour une lanterne éclairant notre avenir d'électeur.
Priorité à droite : en attendant que le Dr Loiseau, qui se tâte encore, ait fini de se palper la glande qui fait enfler les chevilles et hypertrophier les temporales, l'UDF lance Jean-Philippe Geoffroy à l'abordage du navire-amiral Chatel. Pourquoi se priver d'une bonne torpille-maison, façon Koursk, à tribord, alors qu'à bâbord, il n'y a plus que des canots de sauvetage depuis le départ du capitaine Daniel ? L'élection semblait promise à Luc Chatel ; s'était sans compter sur son propre camp, le vôtre cher Bruno, là-même où on nous jure dans le blanc des yeux, qu'en dehors de l'union, point de salut. Et ces gens-là nous demandent de leur confier l'avenir du département !
Un collègue, observateur patenté introduit chez vos amis, explique que la droite n'a trouvé que ce moyen pour solder les comptes des sénatoriales. Et aux cantonales, ils solderont les comptes de ces législatives ? En attendant, ils les ouvrent quand, les dossiers urgents ?

…Un coup à gauche !

Cher Jean-Claude Daniel,
Vous avez-eu la bonne idée de faire évoluer votre carrière politique vers le Pays de Chaumont. En renonçant comme promis à solliciter le renouvellement de votre mandat de député, vous laissez la gauche sud-haut-marnaise dans l'état qui était le sien lorsque que vous la prîtes : proche du néant absolu. Avec le recul, on comprend mieux pourquoi vous n'avez jamais adhéré à un parti de gauche : ici et maintenant, c'est une machine à perdre. À peine vous êtes-vous effacé que cette gauche plurielle se révèle encore plus gauche que plurielle.
Puisqu'avec un candidat unique, elle avait conquis une circonscription acquise depuis des lustres à la droite, elle s'empresse dans la foulée de miser ce gain inespéré sur la pluralité, c'est à dire la diversité, autrement dit la cacophonie. Les Langrois connaissent-ils Sylvie Cotillot ? Au moins autant que les Chaumontais apprécient Didier Jannaud. Ajoutons un vert, c'est irrévocable. Et puis un communiste, pour faire bonne mesure, pour nous rappeler qu'une division peut très bien se camoufler en multiplication.
Alors, cher Jean-Claude Daniel, de ces suicidaires calculs qui nous annoncent déjà de pitoyables rabibochages d'entre deux tours, sortez-vous affligé, déçu, irrité, surpris ? ou seulement amusé…

Eloge du vide

Au sud-sud-ouest de Chaumont, dans le vide désert où batifolent quelques gazelles, il n'y a point d'eau. Les élégants quadrupèdes n'en ont que faire ; elles ne sont pas là pour se rincer le gosier mais pour faire la promotion du département. Chacun sait aujourd'hui que si elles avaient voulu trouver un point d'eau, elles auraient pris le cap nord-nord-est, vers le trou de Bure. On ne devait rien trouver, à Bure. Ni failles, ni fissures, ni radon, rien. Du vide, quoi. Or, voilà que maintenant, on a officiellement aussi de l'eau ! L'eau jadis honnie, ex-ennemie public numéro 1, dont on nous dit désormais – tellement ça baigne – qu'elle représentera un avantage car elle assurera une meilleur confinement des colis. On avale ? Difficilement quand même.
Tiens, Bure, justement : ils ont intérêt à réviser le dossier, nos nombreux candidats peu ou prou déclarés aux législatives. Le moment venu, on posera quelques questions. Pour l'avenir de ce département, il vaut mieux s'y entendre sur le trou qui donne du liquide qu'en volley. Parce que, n'est-ce pas, on n'imaginerait pas un(e) candidat(e) qui n'aurait jamais assisté à un match du CVB venir subitement soutenir l'équipe haut-marnaise au moment des play-down… et de la campagne. Ce serait ridicule. Au singulier. Ou singulièrement ridicule.

Noé-Sido ou néo-Sido ?

«Il ne pleuvait pas le jour où Noé commença à construire l'Arche. Il y avait un soleil à faire péter les pierres1.» Las, les soucis pleuvent à verse sur la Haute-Marne : flux migratoires, vache folle. Et il va tomber des cordes : délocalisations, désertification etc. Alors quand le nouveau Bruno Sido (on le sent plus libre d'esprit et d'initiatives depuis qu'il siège au Sénat) annonce son "arche", les Assises du développement, on apprécierait que certains élus et plus encore ceux qui aspirent à la devenir, apportent leurs planches, plutôt que de dénicher des poutres dans l'œil du rival.
Question saugrenue : quel mammifère terrestre a fait le plus cette année pour la renommée du département : la Simmental élevée à l'herbe grasse du Bassigny et qui fait Salon ou la gazelle dans les sables du sud marocain ? Si l'éternel bon sens doit susurrer un conseil à l'oreille de néo-Noé-Sido, pour la bête à privilégier…
1 : Alessandro Baricco : Next. Albin Michel. 102 pages. 10 euros.

Boussole

Se présentant aux électeurs haut-marnais, Sylvie Cotillot a d'abord longuement insisté sur un point : «je suis de gauche». Nul n'en doutait. Mais la candidate PS a eu raison d'insister, car il risque fort d'y en avoir d'autres.
Elle est un petit peu verte, aussi ; jeune en politique politicienne, s'entend. Elle est de gauche comme Luc Chatel ou François Cornut-Gentille sont de droite : sans doute possible. Pour eux, les "classiques" de l'étiquette à colle forte, c'est labellisé, genre AOC.
Mais où est réellement Jean-Philippe Geoffroy, à part sur le marché le samedi matin, entre la fraîche laitue et le Langres qui s'oublie ? Où est Didier Jannaud, néo-radical, pro de l'étiquette amovible recto-versatile, sinon du sud ? Voilà la nouvelle donne : on était de gauche ou de droite. Voilà qu'il en vient du sud. A en perdre le nord ! Pas complètement. Pas tout le monde. Ce sont les territoires de demain et les ambitions d'aujourd'hui qui s'esquissent. En attendant qu'un autre AOC, Didier Loiseau se décide (à qui fera-t-il croire qu'il n'a pas encore pris sa décision ?), Didier Jannaud va rallier autour de son panache flou bien des hérauts du Pays de Langres, de gauche et de droite, de l'ouest et de l'est. Les boussoles s'affolent. Les girouettes pirouettent. Tant de vents ! Mais notre époque n'invente rien. Diderot, en son temps, l'évoquait déjà…

A droite plus qu'adroit

Cela ne vous rend pas fébrile, la proximité de l'échéance ? C'est tout de même important. L'avenir de la France se joue en partie dans ce choix capital : Karembeu sera-t-il des 22 élus ?
Des élus qui ne sont pas tous à la fête. Prenez le maire de Blumeray, par exemple : il déclare au JHM il y a quelques semaines qu'il ne parrainera aucun candidat en ces termes : « ceux auxquels j'aurais accepté de la donner en en déjà assez. Il n'est pas question que je signe pour les autres ». Nous, on le croit sur parole. Or, voilà qu'on apprend inopinément qu'il a signé pour Bruno Maigret. Peu importe - quoi que…- que ce soit Bruno Maigret. Il déclare une chose ; il fait le contraire. Les lecteurs (s'écrit aussi en un seul mot) jugeront !
Il n'est pas le seul en Haute-Marne ! Curieux, toutes ces signatures récupérées par Bruno Maigret dans le nord-est. Comme si un grand parti de droite préoccupé de barrer Jean-Marie Le Pen avait distribué de-ci de-là quelques consignes. On n'ose l'imaginer, hein ! La politique, c'est autrement plus noble que ce margouillis de bas étage, non ? Il y a de la démission dans l'air

Besoin d'amour

La campagne bruit de mille rumeurs. Quelle campagne ? On en connaît trois : la verte, la nôtre, que sillonnent les tracteurs ; la présidentielle, que sillonnent les passions et quelques oripeaux ; la législative que sillonnent nos candidats.
Une fois de plus, les agriculteurs de la FDSEA ont évoqué «l'image néfaste» de leur profession au sein de la population. Une fois de plus, ils se plantent. Les jeunes agriculteurs l'ont prouvé, voilà peu, en décortiquant une étude nationale sérieuse qui démontrait que les agriculteurs jouissaient d'une image réellement positive. Plus on leur dit, moins ils le croient. Ça s'analyse.
La seconde a transformé en une nuit 22356 Haut-Marnais en nazillons microcéphales. C'est un peu rapide, un peu facile. D'autant que ni vous ni moi n'avons voté Le Pen ! Alors qui ? Pourquoi ? Ça s'analyse.
La troisième mérite aussi toute notre attention. Tout le monde s'accorde à dire, partout, dans le camp des démocrates de droite et de gauche, que l'éparpillement des candidatures est la première cause mécanique de la montée du Front national. Soit. Cette loi mathématique ne serait-elle pas avérée dans la première circonscription de Haute-Marne ? Alors même que Didier Loiseau ne s'est toujours pas prononcé, la candidature insensée de Jean-Philippe Geoffroy divise déjà ceux qui devaient se réunir logiquement derrière Luc Chatel. Même constat à gauche où Sylvie Cotillot et Didier Jannaud devraient être rejoints, si la bêtise continue de le disputer à l'autisme politique, par un vert et un communiste. On dit même que Jean-Claude Daniel… On pourrait rire de la sottise d'une telle rumeur, si la situation ne rendait pas pitoyable un tel aveuglement. Ça aussi, ça s'analyse.

Ça commence par cou...

Le Chien n'a pas que des plumes ; et il en fallait (mais non, pas des plumes) pour organiser dans un contexte politiquement tendu une soirée qui faisait danser l'égalité et la fraternité aux rythmes d'une musique de liberté.
Il en fallait aussi, à Claude Lahner (pardon Madame, c'est une ima… Euh… non, une métaphore) alors qu'entourée par la CGT et ce qui reste du PC, elle a remercié les «gens de droite» comme elle dit, et a qualifié leur présence de "rassurante" au sein de la manifestation chaumontaise du 1er mai.
A droite comme à gauche, donc, certains en ont. Jacques Chirac l'a dit autrement, mais il l'a dit. Mais à droite comme à gauche, certains en ont moins, ou pas du tout. Du courage, bien sûr. Vous pensiez à quoi ?
Le Docteur Sido, au chevet d'une Haute-Marne bien malade, a annoncé en Bragardie qu'il allait rester coi. Il évoquait les assises du développement : «je me tairai, je ne dirai rien». Personne ne lui a répondu : oh si, dites nous tout !
Qu'on se rassure, il a continué de causer, parce que les assises, tout de même, ce n'est pas encore tout de suite. Il a dit : «ce sont les forces vives du département qui parleront ; ceux qui n'ont jamais pris la parole pourront s'exprimer». A-t-il voulu signifier par là que ceux qui parlent, ou qui parlaient avec lui ce soir-là (François Cornut-Gentille et Jean-Marcel Lambinon) ne comptent pas parmi les forces vives ?

Dimey, Rimbaud et les Rapetout

Amis de la poésie, bonjour.
Réunis au sein des luxueuses installations du Festival Dimey, quatre poètes haut-marnais venus spécialement à l'inauguration pour rendre hommage à l'écrivain nogentais. De gauche à droite, saluons Didier Jannaud et sa suppléante, Sylvie Cotillot et son PS, Luc Chatel et ses bambins, Jean-Philippe Geoffroy et ses portables. Sylvie Cotillot semble en forme. Sans doute n'a-t-elle pas encore commencé de grève de la faim ; pourtant, elle fréquente l'appareil socialiste. Elle devrait se méfier. C'est la saison des régimes.
Approchons nous de Jean-Philippe Geoffroy, candidat UDF sans étiquette (si, si, il y arrive).
- Jean-Philippe, la poésie de Dimey serait-elle ce qu'elle est hors du contexte coutellier ?
- Driiiiiing ! Excusez-moi, c'est Raffarin qui m'appelle.
- Merci Jean-Philippe.
Henry Leroux, qui ne lâche pas Sylvie d'une semelle, s'approche. Il semble ravi qu'on lui tende le micro :
- Henry, la poésie peut-elle faire son trou à Nogent comme votre parti a fait le sien à Bure ?
- (…)
- Merci Henry
Amis de la poésie, nous nous retrouverons la semaine prochaine, même heure, même endroit. En attendant, relisons Dimey, Rimbaud et quelques autres. La vie est là.

J'ai mouru de honte

Une visite de la rédaction par un groupe d'enseignants commence généralement par cette question leit-motiv : «pourquoi y-a-t-il tant de fautes dans le journal ?» C'est comme les vœux en début d'année, le collier de nouilles à la fête des mères : on y échappe que par omission.
On pourrait se défausser lâchement : on n'a pas une semaine pour corriger les copie, nous ; on travaille tard le soir, nous. Et autres sots alibis éculés.
Plus subtil : on pourrait rétorquer qu'on a eu de mauvais enseignants, instituteurs en pré-retraite à 30 ans, professeurs de français ignares. Ce ne fut heureusement pas le cas : les miens furent consciencieux, compétents et rigoureux. Leur seule faute fut de me transmettre le virus de la lecture et, plus fâcheux, le vice de l'écriture.
Alors ? offrons à tous ces seuls beaux esprits dûment qualifiés par notre grande Ecole Normale qui ont un soir éructé «pourquoi y-a-t-il tant de fautes…» au cœur d'une rédaction qui les accueillait malgré l'urgence du bouclage, cet extrait authentique de cahier d'écolier estampillé "2002 – Haute-Marne" :
«j'ai mouru, tu as mouru...» Ne voyez là qu'un extrait d'un copieux florilège.
Ce participe trépassé est l'œuvre d'un(e) instituteur(trice) titulaire. Amis visiteurs, soyez les bienvenus chez les plumitifs laborieux. Mais mesurez-bien la pertinence de vos reproches avant de choisir la première pierre.