Année 2003 - Semaines 01 à 10

 

Taxis de la (Haute) Marne

C'est anecdotique. En citoyen responsable, intelligent, prudent, un Haut-Marnais, dûment informé des risques avérés de l'alcool au volant, décide, pour le réveillon, de recourir aux services d'un taxi chaumontais. Il s'y prend à l'avance, les appelle tous, jusqu'à ce qu'il finisse par tomber sur celui qui se déclare de service le soir de la Saint-Sylvestre. Notre homme propose même, pour assurer la réservation, de régler la course à l'avance.
Inutile, répond le taxi. Vous n'aurez qu'à me téléphoner à ce numéro vers 23 h, pour confirmer.
Vers 23 h, notre homme appelle. À 23 h 05 aussi. Puis à 23 h 10, 15, 20, 25 jusqu'à une heure bien plus avancée de la nuit. En vain.
On se doute bien que le client déçu va faire la "publicité" qu'il mérite au chauffeur indélicat. À celui qui, par son sens aiguisé du commerce, jette localement le discrédit sur l'ensemble de sa profession.
Une corporation d'ailleurs déjà citée lors d'un atelier des Assises du développement ; un raccourci pertinent avait été établi entre la situation de la Haute-Marne et celle des taxis de Chaumont. Ils ont chacun leur petit numéro de téléphone particulier au lieu de mettre en place un système intelligent de numéro unique, bien plus commode. Et comme tous les voyageurs qui arrivent en gare n'ont pas toujours leur annuaire sous le bras… Bingo !
Tant que la Haute-Marne sera organisée comme les taxis de Chaumont, eh bien ! tant pis pour les voyageurs, tant pis pour les taxis, et tant pis pour les Haut-Marnais.

Eau chaude

Le trou est-il soluble dans l'eau chaude ? Antoine Allmersch va encore bondir. Le conseiller général du canton le plus concerné par le laboratoire de Bure compte pourtant parmi les plus dévoués, les plus honnêtes, les plus travailleurs du Conseil général. Las pour lui, l'Andra creuse (presque) chez lui ses deux… puits. Soit, va pour puits, puisqu' Antoine Allmersch ne supporte pas "trou". Les mots ont leur importance. Un trou, c'est du vide. Un puits, c'est la même chose avec de l'eau au fond. Où en dessous. Au fond, elle est fraîche. En-dessous, elle est chaude.
L'eau chaude à tous les étages, c'est le confort. Au sous-sol, c'est de la géothermie. Or, si l'on respecte à la lettre les textes, il y a bien là clause de non-trou, de vain puits. Cela dit, la principale Loi sur le sujet a été bafouée des années durant sans que le législateur s'en émeuve outre-mesure. Alors cette eau chaude versée inopinément dans le vin du l'Andra ne résout rien. Le sourcier Cedra nous dit où il ne faut pas mettre les déchets. On attend toujours de savoir où il faut les mettre ; et aussi avec quelle électricité on fera chauffer l'eau du thé !

Grosse clonerie

On ne s'en sort pas si mal, sur ce coup-là. Depuis quelques jours, on n'entend plus parler de la Haut-Marnaise la plus célèbre du monde en l'an 2003. Chut ! Moins fort. Lisez tout bas avant que nos confrères du Monde ou du Herald Tribune ne se réveillent. Louise Michel ? Nenni. Jeanne Mance ? Ce sera pour bientôt, en même temps que Denis Diderot.
Non, vous ne faites pas d'efforts. Vraiment célèbre ! Elle a fait plus de "unes" en 8 jours que Louise et Jeanne en plusieurs siècles. Brigitte Boisselier, bien sûr. La première Haut-Marnaise faite évêque. Il est vrai au sein de la secte fondée par un ancien confrère illuminé, fruit des entrailles d'une Auvergnate qui aurait abusé de la soupe aux choux. Mais Haut-marnaise – chut ! – et surtout qui a failli être à l'origine du premier bébé cloné de l'histoire de l'Humanité. Ça n'est pas rien. Ce n'est peut-être pas vrai non plus. On attend toujours la preuve promise par l'évêque. Soyons francs : on l'attend, mais on ne l'espère pas. Ce serait raëlement faramineux que la plus grosse clonerie humaine du millénaire naissant soit le fait d'une fille de Haute-Marne.
Cela dit, puisque Brigitte Boisselier a de l'entregent avec les petits hommes verts, on pourrait, par son entremise, leur demander conseil pour les puits de Bure et les trous d'Arc, les Assises, le centre de gestion, le château de Joinville…
Avec elle, on n'est plus à une clonerie près.

Chauffe Marcel !

Qui veut la peau de Marcel Lambinon ? On a beau chercher, deux éléments indispensables manquent encore à l'accusation : 1) : le courage d'ôter les oripeaux bien lestes de l'anonymat. 2) : l'énoncé de la faute commise.
Sur ce dernier point, un seul reproche ressort à la relecture de tout ce qui fut écrit sur le sujet : Marcel Lambinon ne dirige plus une entreprise, donc il ne peut diriger la CCI. Il est facile de répondre : 1) S'il dirigeait encore une entreprise ou un site industriel, il n'aurait pas le temps de diriger la CCI. 2) Il dirige la CCI comme une entreprise. Ne serait-il pas opportun d'adopter "la loi" au principe de réalité ?
On ne peut pas confier à un homme une mission puis lui reprocher de s'y consacrer.
La méthode est révélatrice d'un malaise profond qui saisit la Haute-Marne en maints domaines. On pourrait appeler cela la peur de gagner. Des hommes neufs, au profil parfois inattendu – Marcel Lambinon est fils d'ouvrier – mettent les pieds dans le plat. Nouvelles méthodes, nouvelles idées, nouveaux projets, nouvelles ambitions, nouvelles alliances aussi pertinentes que surprenantes, déstabilisent un corps social léthargique qui ne sait plus imaginer.
La nouvelle dimension des Assises du développement nous le confirmera sans doute si on y prohibe la langue de bois. En Haute-Marne, les patrons, les syndicats, les enseignants, les artistes, les sportifs, les élus et les… journalistes ont besoin d'être boostés pour retrouver déjà des ambitions plus conformes à leurs talents, à leurs atouts. Alors, chauffe, Marcel. Chauffe !

Alors, c'est quand ?

On a assez critiqué ici Bruno Sido pour ne pas lui reconnaître aujourd'hui un certain sens politique. De la chance, aussi. Encore faut-il savoir la saisir. La chance, Bruno Sido ne l'invite pas courtoisement à prendre le thé ; il ne la saisit pas non plus. Il la prend. Il l'empoigne. Elle est sienne.
Cela nous vaut le très opportun report des Assises.
Boudée, voire critiquée par ses faux amis politiques, la stratégie "assises" de Bruno Sido, à bout de souffle, s'étiolait. Elle rebondit furieusement aujourd'hui. Acceptons l'augure d'un sénateur des champs ralliant à son panache vert un ou deux ministres… et les mises de fond qui transforment les discours en actes. Attendons que l'État accompagne ici des projets innovants, ambitieux et consensuels initiés ici (au hasard : Pôle Diderot). Vous verrez alors que l'initiative vouée dans le meilleur des cas à d'oublieuses errances deviendra le coup de maître politique haut-marnais de ce début de siècle.
Simple esbroufe ? Utopie fumeuse ? Ou LA SOLUTION ? On n'est plus à une semaine près. Mais bon…
Alors, c'est quand ?

Et si c'était vrai ?

Même si ça n'est pas encore sûr, on se prend à espérer. Et si c'était vrai ?
Tenez, dès hier et pour deux jours encore, on a vu pour la première fois côte à côte sur un seul site en Haute-Marne les trois filières de formation. Rivaux depuis toujours, l'apprentissage, l'alternance et l'enseignement général se sont entendus pour offrir quelque chose d'enfin cohérent aux collégiens et à leurs parents. On a vu aussi des collégiens du public et du privé se mêler pour embrasser l'avenir.
Transposons : Imaginons un projet initialisé par un maire de gauche. Un dossier qui serait relayé par un président de Conseil général de droite. Attention, un beau projet. Pas de la gnognotte avec chrysanthèmes et ruban réunis par la Redoute en 24 heures chrono. Un Projet, somme toute. Avec financements de partout et même d'Outre Atlantique. Avec partenaires très puissants, très nombreux, aussi (re)connus dans le monde de la Connaissance que Langres sur la carte de Météo France. Bref, un PROJET, tellement…, enfin tellement… qu'il faudrait que tout le monde s'y mette pour le porter jusqu'aux fonds baptismaux.
Impensable, en Haute-Marne. Impensable ? Vous en êtes sûrs ? C'est ça qui est peut-être en train de changer, avec aussi, peut-être, la courbe plus tout à fait inéluctable du déclin. Et si c'était vrai ?
(À suivre)

Popaul

Les Haut-Marnais gardent mieux les vaches que les secrets. Du côté des premières, on veut croire, à quelques jours du Salon de l'Agriculture, que la semaine verra germer les semences de la rencontre entre les hérauts de notre ruralité atone, de nos paysans inquiets et le ministre de l'agriculture. On veut croire que s'il "nous" a reçus, ce n'est pas seulement pour faire coucou devant le photographe. On espère, en attendant que nos ruminants et nos petits Langres ne soient - qui sait ?- plébiscités cette année encore à la Capitale.
De Langres, il est déjà question avec la levée d'un secret de polichinelle. Paul plus fort que Denis ? Paul Diderot. Mais écrivez-le plutôt Pôle. Le nom de famille reste le même. Popaul n'est pas le cousin de Denis mais son descendant. L'encyclopédiste a fait des petits, surtout dans les idées. Les idées qui deviennent du savoir. Du savoir qui se répand. Des connaissances qui s'organisent. Et le Pôle Diderot qui va concrétiser tout cela. Comme Diderot, le Pôle est né à Langres. Mais si Diderot s'est fait seul, Popaul, lui, aura bien besoin des Haut-Marnais, de tous les Haut-Marnais, pour transformer l'essai franco-canadien. Dans la perspective des Assises et des ministres qui s'intéressent à cette terre d'avenir, allez, on y croit.

À l'est, en toute Franchise(s)

Soyons francs : la délocalisation partielle de 3P est un moindre mal, pour qui s'autorise un regard sans complaisance ni démagogie sur les Franchises. La mondialisation va passer aussi par Langres. Intégrons tout de suite cette loi coulée dans le plastique : tout ce qui peut être produit et/ou assemblé moins cher ailleurs le sera. Cet "ailleurs", est vaste et proche, dans un temps et un espace singulièrement rétrécis. Entendons-le aujourd'hui.
Quels sont aujourd'hui les clients des sites de production haut-marnais ? Les constructeurs automobiles. Où bâtissent-ils leurs futures usines d'assemblage ? À l'est. Continueront-ils longtemps de faire fabriquer des bouts de voiture sous un morceau de rempart qui n'a même pas été capable de tracer une voie rapide jusqu'à Belfort ? En toute franchise ?
Côté bitume, pour cette fameuse voie rapide, il se fait bien tard. On peut mettre beaucoup d'argent et d'énergie dans ce combat-là. On peut aussi s'engouffrer dans l'organisation des autoroutes de demain. Elles seront numériques. La Haute-Marne et le Pays de Langres se seront plus en marge, mais en plein centre. Si tant est que le Pays de Langres existe un jour, en termes juridiques. Quel jeu joue l'État, là, lui qui sait combien le plastique peut fondre vite aux rayons d'un soleil qui n'a pas fini de se lever à l'est.

Ça rassure

Ça n'a pas été assez dit : la science est grande et le recours aux scientifiques d'un appréciable secours en cette époque tellement troublée que même la terre en tremble.
Il y eut un temps où l'on nous expliqua que le site de Bure avait été choisi parce qu'il n'y avait là, sous le sabot des vaches, pas plus de failles que de séismes.
Or, samedi soir, il semble bien qu'un phénomène géologique qu'il faut bien appeler "tremblement de terre" n'a pas seulement altéré l'alimentation électrique des réverbères du Vert-Bois. Si quarante départements ont ressenti la secousse, il y avait de fortes probabilités, disons 9,9 sur l'échelle du bon sens qui en compte 10, qu'à Bure, terre de sérénité s'il en est, cela bouge aussi.
Et si cela bouge si fort avant même que l'Andra ait touché le fond (de ses trous), on peut se demander, si, ma foi, peut-être que parier tout de suite sur 100 ou 200 mille ans d'immobilité argileuse après ce que l'on vient de vivre, ce n'était pas un tantinet présomptueux.
Nenni répond la science. Nenni ! Ce tremblement de terre a permis à l'Andra «de vérifier que nos stations de mesure sismique fonctionnent bien puisqu'elles l'ont enregistré». On est vraiment rassurés. Non ?

On attend la date

On pourrait donner une petite touche exotique à cette chronique, émouvoir nos vallons paisibles avec la guerre et son authentique et criminelle soldatesque au garde-à-vous devant la bêtise. Là-bas, où des ethnies se font déjà manger. Au sens propre. Au présent, à titre indicatif. Au Congo. Sans Saddam, sans Georges W et sans pétrole. Surpris, hein ? Vous saviez, vous, que cette vraie sale guerre a commencé ?
Certes, on en parle peu ; même si le sang coule beaucoup, et depuis longtemps. Cela nous éloignerait de la Haute-Marne et grèverait par trop le taux de lecture incroyablement élevé de cet entrefilet hebdomadaire. Revenons à nos vaches, sacrées plus belles mamelles du Salon. Revenons à nous.
On se réveille, ce matin encore, sans plus de date pour les Assises du développement. On n'a pas le choix : on attend. Un ministre ? Deux ministres ? Une sacré bonne et grande nouvelle ? Sans promettre quoi que ce soit, Bruno Sido a beaucoup laissé entendre. Trop ? Que va-t-il nous sortir de sa besace ?
Le Sud a le Pôle Diderot et Dijon lui fait des yeux doux. Le Nord, triangulaire, va sous peu se découvrir de nouvelles ambitions. Le centre attend… d'être mûr pour comprendre qu'un territoire, c'est de la surface avec un projet. Bon, d'accord : entre Châteauvillain et Bourmont, ça n'est pas la surface qui manque.