La
25e ligne
Camarade
prof, camarade instit, l'une d'entre vous, ici, en Haute-Marne, y est
allée franco «si je suis devenue enseignante, c'est
pour les vacances et pour la retraite, alors…».
Alors on se doute bien de tout le mal que la camarade pense des projets du
gouvernement. Puis on se dit : à 18 ans, choisir son métier en
fonction de la retraite, chapeau ! Y'a des neurones qui font de la débandade
précoce ! C'est le futur antérieur du subjectif, ça !
Et puis, camarade, on se dit qu'une vocation aussi intense, ça risque
d'avoir de fâcheuses conséquences chez pas mal de jeunes que la
camarade collègue était censée initier aux joyeusetés
du futur simple ; à titre indicatif.
Fi de l'amalgame, camarade. D'une semelle énergique, ne piétine
pas dès la 15e ligne de cet articulet, le JHM dans une dans une sotte
rage réservée par d'amnésiques collègues parisiens à un
livre de ministre. Si tu poursuis ta saine lecture jusqu'à la 25e ligne,
tu liras cette fois le plus grand bien d'un autre camarade, que cette fois
nous nommerons : Jean-Paul Ramillon. Pédagogue par vocation, cet enseignant
qui fait l'honneur de son laïque sacerdoce, est invité ces jours-ci
en Russie pour y former des formateurs. Ce n'est pas la première fois
qu'un pays étranger adapte ou adopte la pédagogie de ce trop
modeste enseignant haut-marnais. Qu'il s'agisse de judo ne change rien à l'affaire.
Chapeau Monsieur le professeur.
Contre, tout contre
Avez-vous remarqué combien il est plus aisé de s'opposer
que de proposer, de détruire que de bâtir ? Vous songez à la
gauche qui, depuis qu'elle a perdu le pouvoir, n'a de cesse de pilonner
le gouvernement sur les retraites. Mais lorsqu'elle était
aux affaires, elle a fait quoi, sur le sujet, la gauche ?
Elle est contre par principe. Cela s'appelle être dans l'opposition,
ou encore : vouloir exister.
A Langres, Didier Loiseau, qui est de droite, est dans l'opposition.
Il est donc contre. En ce moment, c'est contre le Pôle Diderot.
Il n'est qu'à lire sa "contribution" dans le bulletin
municipal. Charles Guené, qui est dans la majorité au Conseil
général, est pour. Farouchement pour. Tout contre, même.
Vous allez dire, il est de droite aussi. Mais ça ne compte
pas.
Alors, comme vous avez de la répartie, vous allez dire : ils sont
tout de même du même camp, ils pourraient parler, entre eux.
Celui qui a compris pourrait expliquer à celui qui n'était
pas là…
Ah, naïfs que vous êtes. On voit que vous ne faites pas
de politique.
Les "faut-qu'on" et
le vrai…
On va faire un jeu. Dans l'esprit, c'est "ni oui ni non". Mais
en plus localisé : C'est "ni y-a-qu'à ni faut-qu'on".
Vous avez une semaine pour vous entraîner : les éliminatoires
se dérouleront samedi prochain à Nogent*. On sélectionnera
les meilleurs d'entre vous pour les phases finales. Il s'agira alors
pour les heureux élus d'évoquer la Haute-Marne en employant
uniquement des verbes à l'actif, au présent et au futur.
Le moindre passé, simple ou composé, vaudra à son
auteur une élimination directe.
Tous les sortis de la première phase (les Yakas) pourront être
repêchés lors d'un stage intensif de montage de vrais projets.
Intervenants : Jean-Loïc Carré et Jean-François Chanot.
Deux styles différents, deux propos différents, deux philosophies
différentes. Les mêmes tableaux de bord, mais disposés
autrement. Et des neurones qui se connectent vite, très vite,
aux problématiques de demain. Le premier monte le projet du bassin
de Nogent, l'autre celui du Pays de Langres. L'un et l'autre associent
formation, recherche et production. L'un et l'autre conjuguent fonds
publics et initiative privée.
On gagnerait à remplacer moult discours officiels par les exposés
powerpointés** de ces deux-là. Car leurs projets sont de
vrais projets ; 1) parce qu'ils contrarient le ronflement paisible des
résignés du bulbe. 2) parce qu'ils jouent déjà l'ouverture
sur l'extérieur.
Même s'ils font tousser les frileux d'ici ; puissent-ils seulement
continuer à convaincre les audacieux d'ailleurs.
Pas vrai ?
* : jour et lieu des Assises du développement.
Pur hasard…
** : Illustrés par une présentation informatique réalisée
avec PowerPoint. Un peu plus efficace que les transparents.
Top
chrono
On nous dit que 400 personnes se sont inscrites aux Assises. On nous dit (le
programme) que ces 401 personnes (un ministre doit arriver dans la matinée)
vont se séparer en deux groupes pour discuter durant presque 200 minutes
au lieu de passer à table. D'abord, on notera qu'ils auront les crocs.
Ensuite, que 401 divisé par 2, cela donne environ 200 ; 200 divisé par
presque autant, cela nous laisse un tour de trotteuse par personne pour tenir
des propos sensés, constructifs, novateurs sur l'avenir de ce département. À moins
que les choses ne soient un peu plus ficelées qu'il n'y paraît
ici…
Parce qu'on n'ose imaginer que Bruno Sido ait reporté de 6 mois la séquence "Nogent" des
assises uniquement pour que deux ministres aux emplois-du-temps tourmentés
en ce moment, viennent faire joli sur la tribune. D'autant que le même
Bruno Sido attend tout le gouvernement en septembre. Donc là, tout à l'heure,
il va se dire des choses. Il faudra être présent à la bonne
minute. Car s'il ne se passe rien, ce n'est pas que la Haute-Marne qui pourra
se faire du souci pour son avenir…
Désiré Delevoye
L'univers est en expansion, depuis le coup de pétard d'avant le temps.
La Haute-Marne aussi, mais c'est plus récent. Le Jour J de l'ouverture
de la Haute-Marne (little bang 52) est arbitrairement fixé au 14 juin. À l'heure
précise où le ministre à ce point désiré -
on a tout de même différé de six mois les assises pour
qu'il soit là – absent, donc, a envoyé son discours !
Il a fait dire des choses intéressantes. Certes, le propos, le ton,
n'avaient rien à voir avec la verve jubilatoire de Jean-Claude Etienne.
Mais bon, on pouvait suivre, encore. Par contre, ne demandez à personne
de pondre 100 lignes sur l'intervention de Patrick Devedjian. Rien que 20 lignes,
il y aurait maltraitance ; limite perversion. Dans l'esprit, cela ressemblait à un
essai critique en 17 volumes in quarto sur l'influence de la culture du colza
transgénique dans la haute vallée de la Blaise sur la vitesse
du TGV en gare de Chalindrey par temps de brouillard. Professeur Etienne, revenez
!
Bruno Sido avait vu large : boissons, stylos, CRS : tout était parfaitement
aligné et en surabondance. Tout. Le Cédra irradiait de gentillesse.
Les syndicats attendaient sagement l'entrevue avec le ministre. Le missile à tête
frondeuse avait revêtu les atours trompeurs de la blonde et svelte silhouette
d'Elisabeth Robert-Dehault. On choisit ses amis, pas sa famille politique.
Zéro
(fait) défaut
Les factures de certains abonnés haut-marnais de France-Télécom
ont pris de l'embonpoint. Oh, pas des milles et des cents ; juste un léger
bourrelet façon poignées d'amour naissantes, qu'on ne repère
que si on regarde là où il faut. Sur une facture détaillée
par exemple.
Les faits d'abord : en voulant appeler un correspondant chaumontais dont le
numéro commence par 03 25 03, l'abonné arrive sur le serveur
(payant et surtaxé ! ) de météo France dont le numéro
est 32 50. Autrement dit, inspiré par le vide absolu qu'il symbolise,
le premier zéro s'est fait la malle. Disparu ! Volatilisé !
Au début, France Télécom a répondu aux mécontents
que cela n'arrivait qu'à des personnes âgées qui manquaient
une touche. Raté : des jeunes aussi en ont fait les frais. France Télécom
a aussi expliqué que l'appareil téléphonique du sur-facturé était
ancien (et donc fatigué, comme les personnes âgées). Manque
de chance, c'est arrivé aussi sur des combinés neufs.
Plus étrange encore, certaines factures détaillées listent
très clairement ces appels à Météo France (avec
date et heure) pour des abonnés qui non seulement n'ont jamais volontairement
composé le 32 50, mais en plus n'ont jamais entendu, même par
erreur, le serveur de Météo France leur répondre.
Quid du 32 50 fantôme ? France Télécom assure : c'est forcément
une erreur – qui se répète un peu beaucoup en Haute-Marne,
de l'abonné. Mais une voix anonyme de chez France Télécom
a fini par dire : «on est en procès avec l'entreprise qui
soustraite la facturation». Mais bien sûr, au pays des vieux
qui tremblent et des téléphones d'avant-guerre, ça n'a
aucun rapport. Aucun.
Allais
les jeunes !
« Partir, c'est mourir un peu. Mais mourir, c'est partir
beaucoup» constatait ma foi fort pertinemment Alphonse
Allais, lequel décrocha son bac à 17 ans. Ne cherchez
pas "Alphonse" dans notre cahier spécial résultats.
C'était avant. Jadis même. Dans le temps. Du temps où Haute-Marne était
peuplée. Si, si, ça a existé !
Revenons au bac, à tous ces jeunes impénitents aux noms couchés
aujourd'hui dans nos colonnes. D'abord, toutes nos félicitations.
Mignonne bachelière, fringant bachelier : n'écoute surtout pas
(on se dit "tu" n'est-ce pas) les vieux de tout âge qui radotent
l'antienne locale : «il faut faire rester nos jeunes pour sauver
la Haute-Marne».
Surtout pas ! Va voir ailleurs. A ton âge, c'est mieux ailleurs. Là-bas,
ailleurs, en te frottant aux autres, dans les bonnes écoles qu'on aura
jamais ici, tu deviendras meilleur. En goûtant d'autres saveurs, en t'initiant à d'autres
valeurs, en acquérant d'autre savoirs, en te noyant dans d'autres regards,
en écoutant d'autres langues, en rêvant sous d'autres étoiles,
tu vas t'enrichir.
Pétillante ex-lycéenne, ambitieux ex-lycéen tes cousins
d'ailleurs ont des choses à t'apprendre, et réciproquement. Plus
riche de l'apport des autres, plus ouvert, plus intelligent, plus instruit,
seulement alors, reviens. Meilleur, tu auras compris que si tu ne pars pas,
ce département va mourir encore plus vite.
Le
eau débit
Au début était le bas débit. Bas débit des idées,
des projets. Belle endormie, la Haute-Marne ronflait doucement, tout doucement,
grisée par les bulles de Rizaucourt et le gouleyant Montsaugeonnais.
Les indécrottables notables du «silence on coule» buvaient
du petit lait. De fait, on coulait. Chut !
À la fin du siècle dernier, quelques neurones insomniaques s'en
offusquèrent. Ce n'est pas parce que la Nature est généreuse
ici que l'intelligente doit se faire rare et le futur disparaître des tables
de conjugaison. Malgré le pchiiiit de Diderot Sciences, les persévérants
de tout poil renouvelèrent l'audace, cette fois en coulant des fondations
là où d'autres s'étaient contentés de creuser un
trou. L'enseignement supérieur, la recherche et les nouvelles technologies
aiment la verdure. Cela tombe plutôt bien. D'ailleurs, si c'est si vert
que cela, c'est aussi parce qu'il y a de l'eau, entre Champagne et Bourgogne. Écoutons
les experts (1) : après-demain, la richesse n'ira pas à celui qui
fabriquera des voitures ou des télés, mais à ceux qui maîtriseront
la gestion des savoirs, les flux d'information (l'économie de la connaissance)
et ceux qui possèderont l'eau (source de vie). Partout dans le monde.
Partout. Même ici. Entre les berges du Der et celles des quatre lacs, aux
sources de la Meuse et de la Marne, le long du canal et à Bourbonne…
Pour s'y préparer, on est encore dans les temps.
1 : Le Monde Économie du 8 juillet, page III.
Tout est possible
L'aurez-vous
noté ? C'est l'été de tous les possibles.
Alors que le baron Seillères s'entiche de défendre «le
fric des travailleurs», que le tour de France reste plus d'un
quart d'heure en Haute-Marne, voilà que Jean-Claude Daniel,
citadin de gauche et Bruno Sido, rural de droite (double pléonasme
trompeur) se perdent en civilités courtoisies. Le maire de Chaumont
vient de rendre un fieffé service au président du Conseil
général.
Il lui propose même de l'accompagner dans ses démarches.
Sans rapport aucun avec ce qui précède, et dans le cadre
de la série "Les grandes fictions de l'été",
imaginons un trajet vers Bruxelles.
Dans le dos du chauffeur qui démarre, deux hommes devisent joyeusement.
«
- Mon cher J-C, merci. Si le rezonage réussit, ce sera un peu
grâce à toi. Je le ferai savoir.
- Allons, Nono, tout le mérite te revient. Ce sont tes projets.
Mais que de soucis, n'est-ce pas ?
- Si je n'avais que cela ! Mais Babeth*, dans le nord, et quelques
autres, dans le sud, y font rien qu'à m'embêter.
- Ben moi, pareil. C'est une question d'environnement qui va me plomber
avec le marché découvert. Pourtant, les écolos,
c'est pas faute de les avoir encouragé. Et t'as vu Cricri**, qu'est-ce
qu'elle me met. Elle était moins teigne quand elle travaillait
pour toi au C.G.
- ...
Un profond soupir, puis un long silence (approbateur, ça n'est
pas certain) répond à l'assertion.
- Elles nous refont le coup des assises départ...
- Attention !
Crissement de pneus. Le véhicule fait une embardée, mord
l'accotement, échoue dans le fossé. TS lâche le volant
et jette un œil dans le rétro. « Pas de casse, derrière
?». Il ouvre sa portière, sort, constate les dégâts
: «on n'ira pas plus loin. C'est pas grave, hein ?».
Mais c'est de la fiction, hein. On est d'accord ? C'est pour de faux. À moins
de lire régulièrement le JHM, on n'imagine pas un mystérieux
TS souhaitant que capotent les projets de Nono. Ça n'est pas
possible.
* Toute ressemblance avec Elisabeth Robert-Dehault serait purement fortuite.
** Idem avec Christine Guillemy.
Tant
(de) pis !
On
est frappé par la méconnaissance des Bragards pour le
sud de la Haute-Marne ; en Bragardie, le sud commence à Joinville.
Une méconnaissance
qui n'a d'égale que sa réciproque : celle des Chaumontais et
Langrois pour les braves gars d'en haut. Et "en haut", ça
débute à Froncles.
On peut porter de jolies œillères. En été, cela peut
même passer pour seyant. On ne voit rien. On ne dit rien. D'ailleurs
il ne se passe rien et tout va bien.
Certains, bien inspirés, se sont résolument tournés vers
Vitry, Bar-le-Duc, la Champagne et la Lorraine. On songe là à cette
CCI qui fut si longtemps "de Saint-Dizier ET de Haute-Marne", comme
si Saint-Dizier n'était pas en Haute-Marne ! Sauf que déjà là,
dans ce ET là, l'économie et les hommes avaient mis un évident
bon sens dont le découpage administratif n'est plus le reflet le plus
pertinent.
C'est là qu'intervient le laitier. Soixante-quinze kilomètres
sous le Triangle. Le camion semi remorque double-cuve, gorgé du bon
et crémeux lait des pis du Bassigny. Tous les matins, repu, il rentre à Langres
par la RN 67. Tous les matins, il berce son lactose à 70 à l'heure,
en descente, avec vent dans le dos. En montée, c'est nettement moins.
La vitesse du camion, parfaitement raisonnable, n'est pas en cause ici ; c'est
l'impossibilité de doubler sur une route indigne de relier deux capitales
de Pays comme Chaumont et Langres. Comme si Chaumontais et Langrois n'éprouvaient
nul besoin de se voir vite et souvent, d'aller l'un chez l'autre, de travailler
ensemble.
La deux fois quatre voies, c'est là qu'il faut la faire. Avec Vatry
et le TGV, les bragards n'auront bientôt plus que faire de Chaumont.
Internet remplacera la préfecture. Mais Chaumont (avec Nogent) et Langres
(avec Chalindrey) nourrissent des ambitions, esquissent des projets qui n'ont
de chance d'aboutir qu'ensemble, en cohésion. On devrait dire "tant
mieux". Mais avec cette desserte là, et le coup du laitier, il
faudra se contenter de "tant pis".