Année 2004 - Semaines 01 à 10

La flambe

Combien d'incendies dans les banlieues de Strasbourg ? de Paris ? de Lyon ? Nos pompiers aussi sont sortis maintes fois durant la nuit de la Saint-Sylvestre. Mais en Haute-Marne, quand les hommes du feu sont sur la brèche, ce n'est pas systématiquement pour éteindre des incendies volontaires entre deux tours désespérées. Ce petit détail-là fait toute la différence. D'un côté, du dépit sans avenir. De l'autre le hasard peut-être aidé par la maladresse. Mais pas la méchanceté. C'est bien mieux pour reconstruire.
Signalons que les Haut-Marnais du bout du monde – ceux d'ici aussi, d'ailleurs – peuvent depuis ce matin télécharger gratuitement sur internet la rétrospective 2003 du JHM. Si vous avez raté le journal d'hier, connectez-vous. C'est un clin d'œil de la galaxie Gutenberg aux connectés de tout poil. Cette année, c'est un peu pour la flambe. Mais après-demain…
Ce clin d'œil de souris optique salue aussi les efforts de certains de nos élus qui n'ont pas manqué de noter que 2004, c'était bien dans le XXI siècle et qui veulent accrocher la Haute-Marne au bon wagon. A propos de wagon, le secrétaire d'Etat aux Transports Dominique Bussereau s'arrêtera dans quelques jours à Chalindrey. Le TGV, ce sera plus tard. Mais les élus que l'on vient d'évoquer auront sans doute des propositions à lui faire…

De moins en moins

À –18 et – 24, on ne peut plus parler de gel. C'est de l'amputation. Les temps sont durs pour le service public : moins 18 postes dans le premier degré et moins 24 dans les collèges. Le principe de réalité fait peu de cas des grands discours sur l'aménagement du territoire, rubrique qu'il faudra bientôt renommer "camouflage du désert rampant".
Parce que ce territoire va mal, les jeunes partent. Moins on a de jeunes couples, moins il y a d'enfants, donc d'élèves. Moins il y a d'élèves, moins on met de profs pour relever le niveau. Moins l'enseignement disposera de moyens, moins il y aura de jeunes pour rester ou revenir.
« L'avenir ne se prédit pas, il se prépare» disait hier soir Bruno Sido. S'il se prédisait, on pourrait écrire, au vu du sort dont est menacé notre enseignement, que ce département va crever. S'il se prépare, on va voir comment ; notamment lors des élections.

Quai des brumes

La scène qui s'est déroulée lundi à Chalindrey est d'anthologie. Le secrétaire d'Etat qui en était l'involontaire catalyseur n'y a vu goutte, mais toute la problématique de ce département s'est trouvée résumée.
On sait qu'un TGV va passer là-haut, bien trop haut, au nord de Saint-Dizier et couper la Champagne et la Lorraine. Le combat de François Cornut-Gentille et de Philippe Bossois est de permettre aux Bragards de le prendre facilement, en se rendant dans la Marne ou dans la Meuse. On retrouve un souci trianglulaire.
Car les Bragards font fi de la Bourgogne. Lorsqu'ils s'y rendent, par ces frimas brumeux, c'est sans s'arrêter, pour se retrouver le plus vite possible au pied des Alpes.
Le sénateur Guené se soucie du TGV Est comme de sa première chemise. Pensez-donc : 80 % des échanges de ceux qui l'ont élu se font avec Dijon. Alors la Lorraine, vous pensez… Lui il sait bien que Chaumontais et Langrois vont se rendre de plus en plus en Bourgogne et réciproquement. Il se contenterait volontiers de quelques trains "régionaux" bien placés dans la journée.
Bruno Sido, lui, a demandé que le TGV Metz-Nice s'arrête à Chalindrey. Ce serait pratique pour descendre à Lyon et Marseille. Ce serait surtout un joli coup à annoncer alors que les élections sont au bout du quai.
Les cheminots, eux, ont tenté de faire comprendre que, c'est bien joli, tout ça, mais si on parlait sérieusement, on ferait bien de sauver le site et les emplois qui y sont liés. Parce que sinon, il n'y aura plus grand monde sur le quai pour prendre des trains qui ne s'arrêtent pas encore. A part la brume.
Ils veulent discuter de l'avenir de Chalindrey. Avec qui ? Administrativement, c'est la Champagne-Ardenne. Pour la SNCF, c'est Nancy-Metz. A un détail près : certains secteurs, de plus en plus souvent, relèvent de Dijon. Chalindrey, c'est la Haute-Marne : un potentiel énorme, idéalement placé en Europe, mais tellement écartelé en France.

In memoriam

Ouf ! Il n'est pas indispensable de dévorer l'International Herald Tribune pour décrypter le monde tel qu'il va. Se risquer à l'art de la prospective, se pencher sur l'histoire des religions, dénicher l'intégrisme sur les haut plateaux afghans. La modeste feuille que vous tenez entre les mains et ces quelques lignes soumises à votre regard gourmet vont tenter d'y pourvoir. Car cette semaine encore, l'actualité haut-marnaise donne bien du sens à l'histoire au présent. Notre département se retrouve en réduction dans le canton de Joinville
Vous voyez Mathons ? Ce n'est pas un gardien de prison qui prendrait du "H", nenni ! Il s'agit d'un minuscule village aux confins du canton en question. Normal, que vous ne connaissiez pas. Vous allez connaître : sans tambour ni trompette, Alain Bruncher, Haut-Marnais persévérant devant l'Eternel, y a installé le Wifi. Et ça marche ! Déjà six connectés. Ramené à la population, cela fait plus de un habitant sur dix à bénéficier de l'internet sans fil, toutes catégories confondues, vaches exceptées.
Restons dans le canton. Tout y est : les hommes entreprenants, la générosité dans l'effort, la communication, la foi dans l'avenir… et le reste. Ah, le reste : cet avis de décès publié hier dans nos colonnes «pour le repos de l'âme de Louis XVI, roi de France et de Navarre». Une messe de requiem aura lieu ce soir au couvent des Annonciades, à Joinville. L'histoire ne dit pas si le latin peut être retransmis en wifi jusqu'à Mathons. Techniquement, ça parait jouable.
Aux desseins de cette très respectable messe, nous ajouterons, vils mécréants que nous sommes, une pensée iconoclaste pour les enfants irakiens qui crèvent faute de médicaments, aux opposants qui croupissent dans les geôles castristes, à ceux qui depuis des siècles, et aujourd'hui encore, partout, subissent le joug des intégrismes de toute sorte. In secula seculorum.

Chaud et froid

Que nous réserve encore comme fascinante découverte ce 3e millénaire balbutiant ? Convenons-en, en Haute-Marne, nous sommes gâtés. Ne vous égarez-pas du côté de la planète Mars, son eau de vie, et ces bidules qui nous envoient des photos couleur haute définition de cette "proche" cousine de la Terre. Allez, on se concentre ! Il s'agit ici de deux découvertes fondamentales : il peut faire très chaud au mois d'août et il peut neiger en janvier. Reprenez les journaux. Comptez les titres. Mesurez les textes. Depuis six mois…
A l'échelle de l'histoire humaine, les générations futures retiendront peut-être ces prémices de colonisation du système solaire par l'homo sapiens perturbé par la grippe du poulet. Et il ne s'agit nullement d'un virus qui sévirait aux commissariats de Saint-Dizier ou Chaumont. Un peu de sérieux.
Mais à l'échelle de notre département, cette canicule, l'été ! Et maintenant cette neige, l'hiver… Non, mais, quelle époque ! Et on voudrait qu'on ne soit pas dépassés par les événements !
Notre époque s'est équipée de gros ordinateurs, de puces très savantes, de disques de plus en plus durs, d'une mémoire vive abracadabrante ; mais d'une mémoire tout court… toute courte.
Expliquons-nous : la chaleur, l'été, la neige, l'hiver, c'est, comment dire ? Naturel ! Voilà le mot : naturel. Même avant la bombe, c'était déjà souvent ainsi. Et s'abriter derrière les assurances, se figer derrière les précautions, c'est un peu oublier que la vie, maladie sexuellement transmissible, n'est qu'un risque ; un gros risque. Statistiquement, depuis l'aube des temps, les premières chaleurs, les premières neiges, très peu ont échappé à la mort. Mais ce n'est pas parce qu'il y a de risque-là qu'il ne faut pas vivre. Et à trop prendre de précautions…

 

Mesdames, messieurs, chers Jean-Claude

Fait court, coco. La formule a fait florès dans toutes les rédactions du monde. Nos lecteurs gagneraient à ce que les journalistes la respectent. Les journalistes gagneraient à ce que les politiques s'en inspirent. Prenons un cas concret. Jeudi soir, inauguration du Forum des métiers. Le premier à prendre la parole dit ceci1 :«Monsieur le député, Monsieur le président du Conseil régional, Monsieur l'inspecteur d'académie, Monsieur le vice-président du Conseil général etc. Imaginez qu'en plus, le préfet et Bruno Sido soient venus ! Cette liste, chacun de ceux qui figurent sur cette liste doit intervenir et donc la relire, en prenant soin de s'en soustraire. Monsieur Machin, Madame trucmuche… Ce temps perdu ! Jean-Claude Daniel a eu la bonne idée de réduire l'effusion de fonctions par un efficace «Mesdames, Messieurs, chers amis». Sa formule englobe les deux principaux sexes qu'il associe… dans l'amitié. C'est déjà ça de gagné !
Jean-Claude Etienne, lui, c'est un autre genre. Moins structuré, certes, mais plus drôle (Ah, le fils de l'archevêque ! ; tant pis, il fallait être là. Sorti du contexte, c'est plus ça). Plus multitâche aussi. Le Président du Conseil régional et le professeur en médecine travaillent en parallèle. Par exemple, si une jeune et jolie femme manque de défaillir durant son intervention (un chouïa longuette, c'est vrai…, mais totalement improvisée) il est capable, tout en suivant le fil de son savant propos, d'établir un diagnostique à 5 m de distance, de commander un traitement à base de glucose puis de prendre le pouls de la belle pour confirmer son premier diagnostique tout en dissertant sur les vertus de la formation tout au long de la vie. Il l'a fait ! Cela dit, ce billet aussi commence à faire lo…

A l'école de Jonchery

A tort, l'événement est passé inaperçu. Il est pourtant aussi symbolique que capital : on peut donc inaugurer dans ce département autre chose que des extensions de maisons de retraite ! Surpris, non ?
Il est sûr qu'à survoler les statistiques démographiques, les vendeurs de cannes ont plus d'avenir ici que les fabricants de poussettes. Mais pas partout. C'est comme dans Astérix, avec LE village. Il en est quelques-uns qui résistent à l'infâme envahisseur Déprimus : Viéville, par exemple. Ou encore Jonchery, qui nous intéresse. Le cas de Jonchery est édifiant. Le maire et son conseil y favorisent l'accueil de jeunes familles par une politique de logements volontariste. Ils y développent les services. La natalité est supérieure à la moyenne (le maire n'est pas nécessairement seul responsable de tout ce qui précède). Et enfin, on y cultive ouvertement les vertus républicaines d'une école laïque et fière de ses missions fondamentales. Ah, au fait, il faut vous dire. A Jonchery, cette semaine, on a inauguré une école maternelle. Une vraie, toute neuve, avec ses petites tables, ses petits bancs, ses urinoirs taille basse. Si, si. Et le pire, c'est qu'on avait d'excellentes raisons de le faire. A peine croyable, hein. Ce territoire aurait donc des raisons d'espérer ? Il en a d'autant plus que les clichés tombent les uns après les autres. Tenez, toujours à propos d'école : Jean-Pierre Nicole (Medef) a dit hier : «les enseignants, ils n'ont pas un boulot facile. Il faut les aider». Ça aussi, c'est comme l'inauguration de la maternelle : qui l'eut cru ?

Kein Problem

On nous cache des choses ! C'est sûr. Tenez, le réseau autoroutier haut-marnais. Il y a l'officiel, en Y, que tout le monde connaît. Et l'autre. Une autoroute très discrète dessert le siège du JHM, rue du patronage laïque à Chaumont. Les plus malins d'entre vous voient déjà venir les autoroutes de l'information, le haut débit et tout le reste. Attendez, c'est plus bas. Non, ici, c'est une autoroute de bitume, pour voitures. La preuve ? la voilà : un lecteur s'est garé le long de la susdite rue, le 19 février à 10 h 22. Malgré la saison, il a écopé d'une "prune". Le préposé a dûment noté la nature de l'infraction et sa référence : «R 421 – 7 alinéa 1 du code de la route» a-t-il mis. Vérifiez ; on l'a fait : le R 421 – 7 alinéa 1 existe bien, très précisément au chapitre "Autoroutes" dudit texte.
Donc, à brobos d'autoroute, der Prézident Zido, der Zénateur Géné und Herr Nolot zont allés en Allemagne. Toutes nuances, couleurs, tendances et opinions enfouies au fond de leurs poches, ils ont étudié, au nom de la Haute-Marne et du Pôle Diderot, dans un consensus louable, une technologie de distribution d'internet par les prises de courant. Force est de le constater : voilà réellement un secteur où nous ne sommes pas en retard. Pas franchement an avance, non. Pas encore. Mais pas en retard. Pour une fois, le train de sénateur, ça donnerait plutôt ça :
« - Nono, mets du charbon, t'occupe pas des signaux.
- kein problem, Charly !»

Délit, Débit, Déni

Un automobiliste qui connaît sa droite, mais aussi le droit, nous signale qu'il a été comme d'autres victime de l'autoroute fantôme qui longe la rue du patronage laïque à Chaumont. Comme quoi ce billet a au moins un lecteur1.
Les avancées certaines de la Haute-Marne en matière de haut-débit ont été repérées depuis longtemps à Paris. Ombelle nous représentera mercredi Porte de Versailles. Il s'agit de haut débit… de lait.
Vous avez remarqué ? les élections approchent. Avec son cortège de basses flatteries, de promesses inconsidérées, de serments à vie. Le maire de Dancevoir était candidat en 2002 à Châteauvillain. Il écrivait alors sur sa profession de foi : «J'aime Dancevoir, qui se sent plus proche de Châteauvillain que d'Arc-en-Barrois». Battu ! Qu'à cela ne tienne, il se présente en 2004 à …Arc-en-Barrois ! Il n'y a que les imbéciles qui ne changent pas d'avis, à moins qu'un glissement de terrain n'ait rapproché Arc de Dancevoir…

1 : Relire avec une attention soutenue le faux billet de la semaine passée.